Le 5 octobre 2025 marquera une date sombre dans la trajectoire politique de Bruno Retailleau. En quelques heures, le président des Républicains a vu son ascension fulgurante se transformer en chute libre spectaculaire. Après quinze mois de reconstruction patiente de la droite française, un simple message sur X a suffi à faire exploser l’édifice politique qu’il avait patiemment bâti.
L’effondrement brutal d’un homme fort de la droite
Les sondages ne mentent pas : Bruno Retailleau a perdu sept points d’opinions favorables en un mois. Selon le baromètre Ipsos BVA réalisé les 9 et 10 octobre, sa cote de popularité s’effrite de 27% à 20%. Cette dégringolade intervient directement après la démission surprise de Sébastien Lecornu, événement dont le président LR porte la responsabilité.
« Ces personnages ont tous donné aux Français le sentiment d’être dans des bisbilles personnelles », analyse Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. Cette observation cinglante illustre parfaitement la perception publique de cette séquence politique désastreuse. L’homme qui incarnait la renaissance de la droite devient soudain le symbole de ses divisions internes.
François-Xavier Bellamy avait pourtant souligné la « légitimité forte » de Retailleau pour 2027, le considérant comme l’un des « artisans absolument déterminants de la reconstruction de la droite ». Mais cette légitimité s’évapore aussi rapidement qu’elle était apparue.
Des Républicains à nouveau fracturés sur la stratégie gouvernementale
L’unité retrouvée des Républicains vole en éclats quinze mois après l’épisode Éric Ciotti. Cette fois, c’est Bruno Retailleau lui-même qui provoque la fracture. Les parlementaires se divisent désormais en deux camps distincts concernant l’attitude à adopter face au gouvernement Lecornu.
D’un côté, les partisans d’une participation gouvernementale s’expriment ouvertement. Michèle Tabarot fustige son président : « Tu n’as pas été à la hauteur (…) On a donné une mauvaise image de nous ». Vincent Jeanbrun et Annie Genevard rejoignent cette fronde en se « réjouissant » publiquement du retour de Sébastien Lecornu à Matignon.
| Position | Représentants | Arguments principaux |
|---|---|---|
| Participation gouvernementale | Michèle Tabarot, Vincent Jeanbrun, Annie Genevard | Peser sur le budget, éviter l’isolement politique |
| Soutien sans participation | Bruno Retailleau, Valérie Pécresse | Préserver l’indépendance, éviter les compromissions |
De l’autre côté, Retailleau, soutenu par Valérie Pécresse, impose la ligne du « soutien sans participation ». Cette position, validée par 74 des 91 membres lors de la réunion du samedi matin, masque difficilement les tensions internes croissantes.
Laurent Wauquiez en position de force pour reconquérir la direction
Paradoxalement, cette crise profite à Laurent Wauquiez, éternel rival de Retailleau. L’ancien président de la région Auvergne-Rhône-Alpes adopte habilement une posture de rassembleur. Jean-François Copé confirme ce retour en force : « J’ai vu physiquement des oppositions très fortes, entre – rebelote – la tendance Laurent Wauquiez contre la tendance Bruno Retailleau ».
Wauquiez déploie une stratégie subtile en évitant d’imposer sa vision personnelle. Lors de la réunion des députés LR, il leur déclare : « À partir de mardi, les choses se décident à l’Assemblée nationale et nulle part ailleurs ». Cette approche pragmatique contraste avec l’autoritarisme reproché à Retailleau.
Les principaux reproches adressés au président LR incluent :
- Une décision trop verticale concernant la stratégie gouvernementale
- Une déconnexion des réalités parlementaires
- Un manque de consultation des élus de terrain
- Une communication désastreuse sur les réseaux sociaux
Une tentative de sauvetage par la consultation des adhérents
Face à cette contestation grandissante, Bruno Retailleau organise un vote des adhérents pour légitimer ses choix. Dans un email envoyé samedi soir, il justifie son revirement après avoir lui-même participé à deux gouvernements macronistes. Cette démarche constitue une tentative désespérée de relégitimation politique.
En revanche, cette consultation semble insuffisante pour apaiser les tensions. Les députés LR, en première ligne en cas de dissolution, contestent ouvertement l’approche de leur président. Le bureau politique du samedi a tourné au « bureau tendu » selon Max Brisson, porte-parole des sénateurs LR.
La menace d’Emmanuel Macron de « prendre ses responsabilités » en cas d’échec de Lecornu plane sur tous les calculs politiques. Cette épée de Damoclès explique en partie la nervosité des députés LR, conscients que leur survie électorale dépend des décisions prises dans les prochains jours.
